mardi 30 juin 2009

Pierre





Pierre est né à Haïti. Il raconte : « La mère de mon père est blanche, mon père est mulâtre et ma mère est noire ». Sa famille fait partie de la classe privilégiée. Pourtant, à peine sorti de l’adolescence, il préfère émigrer aux Etats-Unis. Il fuit la misère qui l’entoure, le racisme qui oppose les membres de sa propre famille, surtout il croit aux esprits et craint les jeteurs de sort. Il vit en Floride puis à New-York, il travaille comme chauffeur de bus scolaires, de bus qui emmènent les fidèles à l’église, de toute sorte de bus en fait. Au milieu des années 80, il se rend en France visiter de la famille, on lui propose un emploi de concierge et comme il aime bien les gens et pense trouver en France la liberté à laquelle il aspire, il accepte.

Sa peinture, les dessins et collages qu’il réalise depuis toujours et qu’on trouve dans chaque recoin de sa loge réinterprètent cette vie qui, davantage qu’une fuite, est le refus d’un système séculaire de discrimination entre noirs et blancs, entre enfants légitimes et bâtards, entre nantis et pauvres. Son œuvre, chaos organisé mêlant matières brutes, teintes saturées et inscriptions occultes, fait bien sûr penser à celle de Basquiat dont Pierre me parle souvent. La mythologie du "Middle Passage" l’imprègne irrémédiablement, les forêts y sont infestées de zombies et de lucioles maléfiques, les femmes y sont des prêtresses vaudoues comme l’était sa mère et les figures noires américaines se côtoient en traversant les décennies de Martin Luther King à Wyclef Jean.

Malgré ce que lui disent ses amis artistes, Pierre se sent trop amateur pour pouvoir un jour prétendre exposer son travail au public. En attendant, sa loge reste toujours ouverte.

mardi 23 juin 2009

Membres